Friday, 18 February 2005

Tactique pour une Europe étoilée

Filed under: — Muad'dib

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Discussion hier avec K. au sujet du traité constitutionnel européen.

Nous en sommes arrivés au fait qu’étant plus ou moins d’accord sur les objectifs, accepter ou refuser le TCE était une question avant tout tactique.

Nous avons fait le parallèle avec le progrès social au XXe: au début du siècle se sont affrontées deux tactiques en matière de lutte sociale. Certains étaient pour accepter les réformes progressives proposées par le patronat, d’autres étaient pour les refuser, de manière à ne pas se laisser entrainer dans une acceptation de la condition ouvrière qui les éloignerait de “l’idéal révolutionnaire”.
Le TCE, c’est un peu la même chose: devons nous engranger les bénéfices en terme de transparence et de démocratie en disant OUI, ou devons nous en rester à un traité moins démocratique en tentant de provoquer la proposition d’un traité plus proche de l’idéal ?

Ma conviction, c’est qu’en rester à Nice, en rester à la politique européenne telle qu’elle est percue actuellement (pas de président “visage de l’Europe”, parlement muselé, non-transparence des décisions du conseil), c’est contribuer à ce que les européens rejettent encore plus les institutions de l’Europe à l’avenir, c’est contribuer à un dégout général de l’Europe et condamner ses institutions à mourir à petit feu.

On se demande souvent si la question du référendum pourrait se simplifier à “oui ou non à l’Europe” ? Je suis persuadé que c’est le cas. Je suis persuadé que voter OUI fera avancer l’Europe et que voter NON lui sera néfaste quoiqu’il arrive.

9 Commentaires »

  1. D’abord sur Publius hier ou ce matin, c’est la 2ème fois que je lis que le NON fait retomber sur le traité de Nice. En fait il faudrait 3 choix aux référendum (“OUI”, “NON”, “OUI par défaut parceque NON c’est vraiment pas bien”). Avec un bulletin pareil, ça éviterait pas mal de polémiques du genre des dernières présidentielles.

    Comment by jid — Friday, 18 February 2005 @ 14:09

  2. C’est clair !
    Peut être qu’un jour le vote électronique sera suffisament développé pour qu’on puisse avoir une VRAIE démocratie populaire.
    Le pire, c’est que quelque soie le résultat, faute d’avoir pu exprimer le pourquoi de leur vote, les électeurs vont se faire voler leur volonté par les sondeurs et les médias influents qui diront ce qu’ils veulent…
    C’est comme ca que tout le monde va crier “la France est libérale !” en cas de victoire du oui, et “la France est souverainiste !” en cas de victoire du non…

    Comment by Muad'dib — Friday, 18 February 2005 @ 14:21

  3. En même temps, l’Espagne a voté oui à une large majorité des votants, et personne n’est en train de dire que les Espagnols sont des libéraux fous furieux, ni des suppots du grand capital qui gouverne l’Europe.

    Comment by Bix — Monday, 21 February 2005 @ 10:13

  4. Y a d’lespoir alors !

    Comment by Muad'dib — Tuesday, 22 February 2005 @ 10:02

  5. Après les Traités de Maastricht en 1992, d’Amsterdam en 1997 et de Nice en 2000, les gouvernements européens veulent maintenant imposer aux peuples une prétendue « Constitution » pour renforcer l’Union européenne. Dans plusieurs pays, un référendum devrait avoir lieu au cours de l’année 2005, notamment en France, si du moins Chirac tient sa promesse. Par ailleurs, les représentants de la bourgeoisie s’entredéchirent, notamment en France, au sujet de l’entrée de la Turquie dans l’UE… Quelle position indépendante les travailleurs doivent-ils adopter sur ces questions ?

    Tout d’abord, il faut bien comprendre la fonction de l’Union Européenne : depuis ses débuts, et notamment depuis le Traité de Maastricht en 1992, ce que les bourgeoisies appellent la « construction européenne » n’est rien d’autre que la construction d’un cadre économique et juridique destiné à servir les intérêts du grand capital : pour les gros patrons et les classes dirigeantes d’Europe, il s’agit à la fois de faire face à leurs concurrents capitalistes des autres continents (notamment des États-Unis, du Japon, de l’Asie du Sud-Est…) et de liquider les acquis des travailleurs européens en attaquant leurs droits durement conquis dans chaque pays, sous des formes différentes, par la lutte de classe (Sécurité sociale, retraites, école publique, services publics…). Les travailleurs n’ont donc aucun intérêt à cette prétendue « construction européenne » : alors que les gouvernements nous avaient promis la solidarité et la prospérité en Europe, ils ont démontré dans les faits et ils démontrent chaque jour davantage qu’ils sont incapables de mettre fin au chômage de masse, aux licenciements, aux délocalisations, à la surexploitation, à l’explosion de la précarité… En revanche, tous ces gouvernements bourgeois, qu’ils soient de droite ou de gauche, ont multiplié les cadeaux au patronat, ils ont privatisé les entreprises publiques, ils ont organisé des coupes claires dans les budgets sociaux sous prétexte de limiter les déficits publics et ils ont brisé dans tous les pays de nombreuses conquêtes sociales, sous prétexte de baisser le « coût du travail ». Ainsi, les travailleurs (ouvriers, employés, enseignants, petits paysans, etc.) ont pu constater tous les jours dans leur chair que la « construction européenne » des bourgeoisies n’a rien à voir avec le progrès social et la solidarité, mais elle est intégralement dirigée contre les intérêts de la majorité des populations d’Europe.
    Mais il ne s’agit en aucun cas de se réfugier dans un repli nationaliste : d’un point de vue économique, celui-ci n’est pas possible à l’heure de la « mondialisation », et les économies des différents pays européens en particulier sont intimement liées les unes aux autres, rendant historiquement nécessaire, depuis longtemps, le dépassement des frontières héritées du passé. D’un point de vue idéologique, le nationalisme est entièrement réactionnaire : contre l’extrême droite démagogue, raciste, voire fasciste, il faut dire clairement que les ennemis des travailleurs, ce ne sont ni les travailleurs immigrés, ni ceux de l’Europe de l’Est ou de la Turquie, qui sont victimes au contraire d’une exploitation terrible, avec des salaires de misère et presque sans droits. En réalité, dans tous les pays, les travailleurs sont confrontés aux mêmes ennemis, qui sont les gros patrons, les spéculateurs et les gouvernements à leur service, car tous ces gens-là ne vivent que du travail et de l’exploitation des salariés. C’est pourquoi les travailleurs doivent s’unir par delà les frontières et mener ensemble un combat commun : tout en défendant leurs acquis sociaux dans chaque pays et en se battant pour de nouvelles conquêtes dans tous les pays, ils doivent combattre aussi bien les États bourgeois nationaux que l’Union européenne bourgeoise, puisque les uns et les autres ne sont que des instruments du capital.

    Sabotons la « construction européenne » des capitalistes !
    Infligeons une défaite aux bourgeoisies de France et de l’U.E. !

    Mais dans les circonstances actuelles, le combat contre le projet de « Constitution » européenne prend une importance particulière, et plus encore depuis qu’un référendum à son sujet a été annoncé. Bien sûr, les bourgeoisies européennes n’ont pas attendu ce texte pour mener une politique réactionnaire, et elles continueront même s’il n’est pas adopté. Cependant, on ne saurait s’en tenir à cette généralité, comme le fait par exemple Lutte ouvrière : en effet, l’échec de cette « Constitution », et notamment la victoire du « non » au référendum constituerait une défaite cinglante pour les bourgeoisies d’Europe, en particulier pour « notre » propre bourgeoisie. Car, depuis des années, les principales forces bourgeoises (UMP-UDF et PS-Verts) sont unanimes, elles ont rassemblé tous leurs efforts pour construire l’Europe des banquiers, des capitalistes et des technocrates, en piétinant plus que jamais les intérêts des travailleurs, tout en essayant de leur faire croire que c’était pour leur bien. Or le référendum annoncé sera l’occasion pour les travailleurs conscients de dire qu’ils ne sont pas dupes, qu’ils ne veulent pas de cette Europe capitaliste et de tous ces gouvernements de droite ou de gauche qui, depuis des années, se sont alliés pour l’édifier. Historiquement, un rejet franc et massif de la « Constitution » par les travailleurs conscients serait le premier revers populaire majeur, le premier sabotage massif, que subirait le processus de « construction européenne » dans lequel s’investissent pleinement, depuis des décennies, les bourgeoisies européennes et leurs représentants politiques. Et ce serait aussi, bien sûr, en France, une importante défaite politique pour tout le gouvernement Chirac-Raffarin-Sarkozy. Cette défaite politique de la bourgeoisie ne serait certes pas suffisante pour inverser le rapport de force entre les travailleurs et les capitalistes, qui se joue avant tout sur le terrain de la lutte de classe directe, notamment dans les grèves et dans la rue. Cependant, elle ralentirait la construction de l’Europe capitaliste, et surtout elle pourrait ouvrir une situation politique plus instable pour les bourgeoisies, dont les fractions sont déjà en train de se diviser, notamment au PS. Or les travailleurs ont tout intérêt à ce que les projets de la bourgeoisie soient entravés et à ce que ses différents représentants se divisent et se tapent eux-mêmes les uns sur les autres : tout ce qui affaiblit politiquement le camp capitaliste offre aux travailleurs l’opportunité de développer et de renforcer leur propre politique indépendante.
    Il s’agit donc d’utiliser la situation politique actuelle pour mettre en avant un « non » de classe à la « Constitution », donc à l’Union européenne et aux gouvernements nationaux de droite et de gauche qui en sont les promoteurs. Ce « non » des travailleurs conscients n’a évidemment rien à voir avec celui de l’extrême droite nationaliste et raciste, qui voudrait en fait aller encore plus loin et plus vite que Chirac-Raffarin dans la destruction des acquis sociaux. Mais ce « non » des travailleurs conscients ne saurait non plus se confondre avec celui de dirigeants du PS tels que Fabius : ces gens-là disent soudain « non » à la « Constitution », mais c’est uniquement pour canaliser le mécontentement populaire derrière leur propre nom… et pour servir ainsi leurs ambitions personnelles de 2007. Car, en réalité, sur le fond, Fabius et ses semblables ne s’opposent absolument pas à la construction de l’Europe capitaliste, ils ne mettent nullement en cause la politique menée depuis vingt ans, notamment de leur propre part, ils ne veulent absolument pas abroger le Traité de Maastricht et les autres et, tout en critiquant le projet actuel, ils veulent en réalité une autre « Constitution européenne » au service du capital et de la bourgeoisie, un autre texte qui impose lui aussi la « libre concurrence » et les « critères de Maastricht » contre les intérêts des travailleurs. Il ne faut donc se faire aucune illusion sur les intentions réelles d’un Fabius, qui d’ailleurs soutient en même temps une position réactionnaire contre l’entrée de la Turquie dans l’Union européenne.

    Pour l’Europe des travailleurs,
    par et pour les travailleurs

    Le « non » des travailleurs conscients à la « Constitution » européenne est donc un « non » à l’Europe du capital, mais c’est un « oui » à la perspective d’une autre Europe : une Europe de la solidarité des travailleurs et du progrès social pour tous, qui s’étende jusqu’à la Turquie au Sud et jusqu’à la Russie à l’Est. Mais, contrairement à ce que prétendent tous les partisans d’un retour au capitalisme « régulé » par le keynésianisme (le PCF, les « altermondialistes », les signataires de l’appel lancé par la « Fondation Copernic », y compris la LCR !), une telle Europe ne saurait être qu’une Europe débarrassée du capitalisme, car celui-ci ne peut être réformé, « régulé » ou « humanisé » : une telle Europe ne peut être qu’une Europe des travailleurs, une Europe communiste révolutionnaire. Pour réaliser cet objectif, il n’y aura pas d’autre voie que d’imposer dans chaque pays un gouvernement des travailleurs, par les travailleurs, pour les travailleurs :
    • Seuls de tels gouvernements révolutionnaires pourront liquider les institutions de l’UE et des États bourgeois, et mettre en place des institutions réellement démocratiques permettant aux travailleurs d’exercer eux-mêmes le pouvoir à tous les niveaux et dans tous les domaines, avec des délégués élus, mandatés et révocables à tout moment ;
    • Seuls de tels gouvernements révolutionnaires pourront mettre fin à la dictature des marchés financiers, des banques et des multinationales, en collectivisant les grandes entreprises pour mettre fin au chômage par la répartition du temps de travail entre tous, et pour que les travailleurs puissent diriger eux-mêmes leurs usines et leurs établissements, en les faisant fonctionner non plus dans l’intérêt d’une minorité privilégiée, mais dans l’intérêt de la majorité ;
    • Seuls de tels gouvernements révolutionnaires pourront garantir les conquêtes sociales, démocratiques et féministes obtenues par les luttes du passé, rétablir celles que la bourgeoisie a supprimées et en réaliser de nouvelles au profit de la majorité ;
    • Enfin, seuls de tels gouvernements révolutionnaires pourront mettre fin aux guerres injustes des impérialistes, supprimer la prétendue « dette » des pays dominés, accorder la citoyenneté pleine et entière aux travailleurs immigrés et instaurer des relations pacifiques, solidaires et fraternelles entre les peuples, non seulement à l’intérieur des frontières de l’Europe, mais dans le monde entier.
    La réalisation de cet objectif n’est certes pas pour aujourd’hui, mais il doit être présenté, discuté et préparé dès aujourd’hui, car tout projet politique s’inscrit dans la durée et celui-ci est le seul qui permette de rompre réellement avec la logique infernale du capitalisme, avec l’escalade des guerres impérialistes et avec la spirale de la régression sociale subie par les travailleurs. En outre, cet objectif est le seul qui permette, dès aujourd’hui, de mener le plus loin possible les luttes sociales qui ont lieu quotidiennement, de les mener sans complexe, avec fermeté et détermination, contre les patrons et les gouvernements qui ne peuvent être vaincus que par la lutte de classe la plus inflexible. Enfin, il faut souligner que cet objectif est tout à fait réalisable à terme, à condition que, dès aujourd’hui, les travailleurs s’en saisissent, en discutent et s’organisent pour préparer sa réalisation : cela suppose de commencer sans attendre à construire un véritable parti anti-capitaliste : un parti communiste, révolutionnaire et internationaliste.

    Pour un parti communiste révolutionnaire internationaliste, pour un front uni des organisations ouvrières et populaires

    Sur la base de son propre programme, un tel parti aurait pour tâche de participer au rassemblement unitaire des travailleurs contre l’Union européenne et contre tous les gouvernements bourgeois. Tout en développant les positions communistes révolutionnaires qui sont les siennes, il devrait se prononcer pour le front uni des organisations qui se réclament des intérêts spécifiques des travailleurs :
    • Les syndicats doivent se prononcer pour le « non » à la « Constitution » européenne et mobiliser leurs adhérents en dénonçant l’Europe du capital et les gouvernements ;
    • Les partis communistes et les militants socialistes de gauche doivent rompre réellement avec la politique du PS, ils doivent unir leurs forces avec celles des syndicats et de l’extrême gauche contre les gouvernements et les partis de droite et de gauche partisans de l’Europe du capital ;
    • Les organisations d’extrême gauche (notamment LO, LCR et PT) ont une responsabilité toute particulière : puisqu’elles se réclament officiellement du socialisme, elles doivent prendre la tête de la campagne contre la « Constitution européenne » et la mener ensemble, mais en rompant avec tout réformisme et en mettant en avant une perspective ouvertement socialiste et révolutionnaire.
    Sans attendre, des réunions de travailleurs doivent être convoquées partout, dans les usines, les bureaux, les quartiers, afin de commencer la campagne pour le « non » de classe à la « Constitution » européenne, en relation avec le combat pour la défense des acquis, contre les licenciements et la précarité, contre les privatisations… L’avant-garde des militants révolutionnaires a pour devoir de participer à de telles réunions, de les convoquer dès que possible et d’y proposer toujours, sans hésitation, le programme du communisme révolutionnaire. Car ces réunions et ces discussions, y compris les désaccords au sein du mouvement ouvrier, ne pourront que développer la conscience de classe, vivifier la lutte de classe et contribuer ainsi, en ce qui concerne la France, à surmonter les défaites-trahisons de mai-juin 2003 et du printemps 2004.

    Comment by K. — Tuesday, 22 February 2005 @ 23:39

  6. PRÉSENTATION CRITIQUE DU PROJET DE « CONSTITUTION EUROPÉENNE »

    Le projet de « Constitution européenne » a été élaboré sous la direction de Giscard, voté par le Parlement européen en septembre 2003, adopté par les chefs d’État et de gouvernement européens en juin 2004 et finalement signé solennellement le 29 octobre. Il doit maintenant être ratifié dans chaque pays, soit par référendum, soit par un vote des Parlements nationaux, selon les cas.

    Objectif général

    Cette « Constitution » intègre l’ensemble des traités précédents (Rome, Maastricht, Amsterdam, Nice), tout en aggravant leurs dispositions et en redéfinissant les règles de fonctionnement de l’UE. Elle étend notamment le domaine de compétence des instances dirigeantes de l’UE (Conseil des ministres et Commission européenne) en réduisant le droit de veto des États membres, ramenant à la portion congrue les sphères où ceux-ci restent réellement maîtres de leurs propres affaires. L’adoption de ce texte signifierait donc un pas en avant décisif sur la voie de la constitution de l’UE comme entité juridique et politique autonome, dont les instances dirigeantes soient seules souveraines en dernière instance. Jusqu’à présent, l’UE était certes déjà en elle-même une arme juridique et politique dans la lutte de classe du capital contre les travailleurs ; mais il s’agit maintenant de faire de l’UE un véritable gouvernement européen, si l’on définit celui-ci, avec Marx, comme le « conseil d’administration de la classe bourgeoise », puisqu’il serait souverain dans de nombreux domaines, à commencer par l’économique et le social. Le but est donc pour les bourgeoisies européennes de disposer d’une arme politique et juridique redoutable, à la fois pour mener leur lutte de classe contre les travailleurs européens et pour faire valoir leurs intérêts collectifs dans le cadre de la concurrence capitaliste internationale.

    Une arme contre la laïcité

    Le « préambule » du texte affirme que celui-ci s’inspire des « héritages culturels, religieux et humanistes de l’Europe » et parle de « l’élan spirituel » qui a traversé le continent — Giscard ayant précisé que, avec cette notion « d’élan spirituel, il est évident qu’il s’agit de la religion chrétienne ». De plus, selon l’article I-52, « reconnaissant leur identité et leur contribution spécifiques, l’Union maintient un dialogue ouvert, transparent et régulier avec ses églises et organisations». Dès lors, le principe de la laïcité de l’État et de l’École serait fragilisé et menacé dans les pays où il existe. D’ailleurs cela en dit long sur l’hypocrisie d’un Chirac ou d’un Hollande, par exemple, qui se posent en défenseurs de la laïcité en s’en prenant à des lycéennes musulmanes… tout en voulant imposer cette « Constitution » d’inspiration chrétienne et en finançant grassement les écoles catholiques !

    Une arme pour établir
    le règne absolu du marché

    « L’Union offre à ses citoyens un espace de liberté, de sécurité et de justice sans frontières intérieures, et un marché unique où la concurrence est libre et non faussée. » (Art. 1-3-2.) Et « les États membres et l’Union agissent dans le respect du principe d’une économie de marché ouverte où la concurrence est libre ». Le but final est une « haute compétitivité »... Il découle de tout cela que le rôle fondamental de l’UE (Commission, Conseil européen, Conseil des ministres, Banque centrale, Cour de justice et subsidiairement le Parlement) est « d’établir les règles de concurrence nécessaires au fonctionnement du marché ». Certes, le texte intègre aussi la « Charte des droits fondamentaux » adoptée à Nice en 2000 ; mais celle-ci définit des « garanties » tellement minimales qu’elles sont presque toutes inférieures à celles qui existent aujourd’hui dans les lois sociales des différents pays…

    Une arme pour diminuer
    la valeur de la force de travail

    Le texte fait des « critères de convergence » de Maastricht, qui avaient été justifiés notamment par l’objectif de créer l’euro, des principes intangibles de la politique budgétaire. Cela vise à interdire juridiquement aux gouvernements nationaux de pouvoir céder aux mobilisations des travailleurs en octroyant des ressources financées par le déficit budgétaire et la politique monétaire. En ce sens, le principal avantage de cette disposition, pour les bourgeoisies de l’UE, c’est d’être un redoutable instrument politique pour diminuer la valeur de la force de travail des salariés. En effet, l’instauration de l’euro a entraîné la disparition des taux de change et d’intérêt, et le Traité de Maastricht a limité considérablement le droit d’intervention des États dans la politique économique ; dès lors, la seule variable restant pour ajuster les différentes économies de la zone est le salaire, notamment le salaire indirect (Sécurité sociale, retraites, budgets de santé, de logement et d’éducation…).

    Une arme contre les services publics

    Le texte consacre le terme de « services d’intérêt général » (SIG), substitué à celui de service public, qui est absent du texte. Or les « SIG » se distinguent des services publics car ils peuvent aussi bien être privés que publics et, s’ils sont publics, ils ne doivent pas toucher de subventions de l’État : « Les États membres, en ce qui concerne les entreprises publiques et les entreprises auxquelles ils accordent des droits spéciaux ou exclusifs, n’édictent ni ne maintiennent aucune mesure contraire aux dispositions de la Constitution (…). Les entreprises chargées de la gestion des services d’intérêt économique général ou présentant le caractère d’un monopole fiscal sont soumises aux dispositions de la Constitution, notamment aux règles de concurrence, dans les limites où l’application de ces règles ne fait pas échec à l’accomplissement en droit ou en fait de la mission particulière qui leur a été impartie. Le développement des échanges ne doit pas être affecté dans une mesure contraire à l’intérêt de l’Union.. » (Art. III-55.) Bref, les monopoles des entreprises nationalisées seront interdits — ce qui implique dans les faits leur privatisation.

    Une arme anti-démocratique

    Les principales instances de l’UE ne sont pas élues et contrôlées par les citoyens. Pourtant, elles seront désormais seules souveraines dans la plupart des domaines de la politique économique et sociale, les États nationaux devenant de simples rouages de leurs décisions : « La Constitution et le droit adopté par les institutions de l’Union dans l’exercice des compétences qui lui sont attribuées ont la primauté sur le droit des États membres » ; « les États membres exercent leur compétence dans la mesure où l’Union n’a pas exercé la sienne ou a décidé de cesser de l’exercer »… Les principes de la souveraineté populaire et de l’élection des dirigeants ne sont plus reconnus : c’est une régression anti-démocratique, qui montre que le capitalisme contemporain tolère de moins en moins toute idée de contrôle populaire, même limité et formel, comme c’est le cas aujourd’hui à l’intérieur des États bourgeois. En particulier, seule la Commission européenne, non élue, a l’initiative des lois : celles-ci « ne peuvent être adoptées que sur proposition de la Commission » (art. 25), les élus des Parlements (y compris ceux du Parlement européen) ne peuvent pas proposer eux-mêmes directement les lois du niveau supérieur, les plus contraignantes, appelées « lois européennes ». Ces lois sont définies comme des « acte(s) législatif(s) qui lie(nt) tout État membre destinataire quant au résultat à atteindre, tout en laissant aux instances intermédiaires la compétence quant au choix de la forme et des moyens ». Or la loi européenne serait « obligatoire dans tous ses éléments et directement applicable dans tout État membre » (art. 32). Dès lors, les élus des États, comme ceux des régions, ne pourraient prendre de décisions que sur les moyens à mettre en œuvre pour exécuter les lois européennes. Pour l’essentiel, la compétence propre des États se ramènerait à « maintenir l’ordre public » et « sauvegarder la sécurité intérieure » (art. 1.5.1.). Quant aux prérogatives sociales, éducatives et de santé, elles doivent être transférées aux régions et aux communes : c’est la fameuse « décentralisation », instrument politique pour briser l’égalité des droits et les acquis.

    Une arme impérialiste

    Enfin, le projet de Constitution entend accélérer la constitution d’une « Europe de la défense », qui n’a été jusqu’à présent qu’embryonnaire car les intérêts des différents États impérialistes nationaux restaient divergents, comme l’ont bien montré leurs tensions au moment de la guerre en Irak. Cependant, sur la scène internationale, comme l’indiquent les négociations de l’OMC, les différentes bourgeoisies nationales d’Europe ont souvent intérêt à s’unir pour imposer aux pays coloniaux et semi-coloniaux leurs intérêts communs, et parfois pour les défendre ensemble contre les États-Unis. Or l’hétérogénéité persistante de l’UE ne lui permet pas de peser dans ces négociations commerciales comme elle pourrait le faire si elle était unifiée : c’est pourquoi un renforcement de son homogénéité est une priorité pour les auteurs du projet de « Constitution ». Certes, on est encore loin de la transformation de l’UE en une force politique impérialiste homogène, capable de faire jeu égal avec les États-Unis dans la concurrence économique internationale — sans parler du maintien de l’ « ordre » mondial. Cependant, une fraction des bourgeoisies européennes, notamment en Allemagne et en France, voudraient accélérer le processus de constitution d’une Europe impérialiste unifiée. Or, de ce point de vue, un pas serait manifestement franchi avec la « Constitution » : elle prévoit que certains aspects des affaires étrangères des États européens seront pris en charge directement par l’UE et sa Commission, et elle affiche l’objectif d’une « politique de sécurité et de défense commune » — tout en ajoutant bien sûr qu’elle « sera compatible avec la politique arrêtée dans le cadre de l’OTAN ». C’est la porte ouverte à des interventions militaires spécifiques de l’UE.

    Comment by K. — Tuesday, 22 February 2005 @ 23:46

  7. Môssieur K., ne confond quand même pas mon blog avec un tract du PT, format A3 en corps 6 … ! Ca rend un peu le bidule illisible.

    Bon, je laisse le commentaire parceque c’est toi…
    (ceci dit je constate que tu as des choses à dire, même si c’est un peu PT-proof, donc je renouvelle ma proposition de t’aider pour un blog !)

    Comment by Muad'dib — Wednesday, 23 February 2005 @ 10:24

  8. Je ne savais pas qu’ils avaient autant de choses à dire au PT, ça doit être inversement proportionnel à l’influence électoral. ;)

    Comment by Bix — Wednesday, 23 February 2005 @ 17:39

  9. Arf, j’avais vu une interview de Gluckstein lors des présidentielles de 2002: il avait parlé pendant 3 minutes, mais à une cadence hallucinante. L’anti-thèse de l’amateur d’effet de tribune !

    Comment by Muad'dib — Wednesday, 23 February 2005 @ 17:51

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